Levez les yeux, découvrez le Casablanca Art Déco
Du siège d’une banque au parc de la Ligue Arabe, en passant par quelques villas insolites et des cages d’escaliers monumentales, Casablanca regorge de trésors Art Déco. M!M a participé à l’une des petits visites organisées par l’association Casamémoire.
Le promeneur casablancais a généralement tendance à marcher la tête baissée, les yeux rivés sur les nids de poule et les trottoirs aux tailles aléatoires pour éviter de se retrouver avec une cheville à 90°. Pourtant, il ferait bien de lever parfois la tête : la ville regorge de splendeurs architecturales, que l’association de protection du patrimoine Casamémoire propose de découvrir. Pour le moment, malheureusement, elle affiche complet, et les bénévoles qui assurent ces visites ne peuvent plus accueillir de visiteurs, du moins en attendant qu’ils parviennent à passer le relais à des guides officiels. M!M s’est glissé lors d’une de ces visites très privées.
« Je vous préviens, les vrais monuments de Casa, ce sont les banques, les parkings, les cinémas », explique d’entrée de jeu la guide. En effet, si la ville à un riche passé, son architecture est toute récente. Un siècle, au plus, pour les bâtiments les plus anciens, si on excepte, évidemment, la médina. C’était la grande idée de Lyautey : organiser des villes nouvelles pour laisser les vieux quartiers intactes. La notion de « monument historique » était née, et Casablanca est devenu un laboratoire urbain à grande échelle. « Ce qui a été fait ici en 1912 a été réalisé en France après la Première Guerre Mondiale. »
« Rien n’a été rénové, on retrouve tout intact »
Le statut de la ville, le besoin de constructions urgentes, la relative tolérance de Lyautey pour l’expérimentation, autant de facteurs qui ont permis aux architectes de laisser libre cours à leur imagination.
Au cours de la promenade, donc, nous apprenons à découvrir ces lieux que nous voyons parfois chaque jour, sans les regarder. Une banale tour d’appartements ? Non, celle-ci à une architecture particulière, là du zellige, là une fresque, là une forme d’avion. Une poste ? Oui, mais regardez le fronton, avez-vous déjà fait attention à ses sculptures ?
Dans les années 20, il n’y avait qu’un seul matériau de construction pour la ville : le béton armé. Si on critique les constructions d’aujourd’hui, qui ont tendance à s’effriter à peine terminées, celles d’hier sont tout de suite plus intéressantes. Sous les couches de pollution, on découvre ainsi des façades ou des cages d’escaliers impressionnantes qu’on ne soupçonnerait pas. « Et pour la plupart, elles ne sont pas rénovées, enchaîne la guide, c’est un vrai bonheur pour les architectes. On trouve tout dans son jus, intact. » Pour les architectes, et pour tous ceux qui apprennent à regarder. Si vous passez près du boulevard Mohammed V, le boulevard Hassan II, ou encore autour de la Cathédrale de béton blanc, vous êtes maintenant prévus. Empruntez les petites galeries marchandes abandonnées, ouvrez les portes des immeubles, regardez les fers forgés… Et pensez à lever les yeux.