Voir Marrakech et... rester en vie
Beaucoup de pub pour le Maroc que celle véhiculée par la soirée consacrée à Marrakech et qui fut diffusée, samedi dernier, à une heure de grande écoute sur France 2 et relayée juste après par 2M. Une soirée «people» faite par et autour du «nice people». Les stars étrangères qui se sont succédé pour prendre la parole (Marc Lavoine, Charles Aznavour, Patrick Bruel) ont tous évoqué la richesse culturelle de la cité ocre et, par ricochet, celle du Maroc tout entier.
La seule « tête couronnée » de la soirée, et qui était à côté de la plaque, fut incontestablement un certain Frank Dubosc dont l'émission se serait bien passé de ses pitreries. Confondant souk, bazar et - suivez son joli regard - camping, - l'humoriste aux yeux bleus turquois, ne s'est pas gêné de tourner en ridicule les « bougnoules ». Tantôt, il marchande un tapis avec un vendeur dont on ne sait pas s'il était venu d'une autre planète, tantôt il prenait les chauffeurs de taxis pour des arnaqueurs qui n'utilisent pas le compteur pour les touristes en négociant la course au prix d'un aller et retour Casa-Londres.
C'est vrai aussi que nos amis français raffolent des répliques à l'emporte-pièce de Frank Dubosc mais celles faites lors de la soirée ne correspondaient pas à « l'orthodoxie » du moment. Difficile d'échapper au cliché reçu ? Celui de fourguer dans chaque émission « une carte postale » où la présence d'une « bête » est des plus recommandables ? C'est vrai qu'avec Dubosc on n'a pas eu cette fois-ci droit à un chameau, à un serpent qui charme, à un singe qui fait le pitre (décidément), mais à un âne qui brait et qui re-brait à satiété. Mais bon, à chacun l'entourage qu'il mérite, me diriez-vous, n'est-ce pas ? Laissons les animaux de bonne compagnie (le corbeau et le renard, la chèvre de Monsieur Seguin, la cousine Becassine et le chat botté à la maroquinerie, Louis Vouiton à Frank Dubosc) et retournons plutôt à nos moutons de Panurge :
Marrakech plait de plus en plus aux étrangers et c'est justement ce coté pittoresque qui fait son charme.
Maintenant les quartiers populaires deviennent de plus en plus chers, puisque de plus en plus peuplés par des « jet-setteurs » fortunés qui viennent se frotter (sans se piquer ?) aux autochtones en les transformant de plus en plus en de beaux quartiers. Personne, en vrai, n'aime la laideur, contrairement à ce qu'a essayé de nous faire croire Frank Dubosc. Cette bourgeoisie qui sent bon le parfum, qui aime vivre, s'enthousiasme donc par le vieux quartier populaire : son bain-maure, son écurie pour les « b'ghale », son four traditionnel, ses petits gens qui marchandent avant d'acheter ; admettant ainsi qu'il existe d'autres charmes que celui de l'argent et attirés par la chaleur d'un urbanisme à échelle humaine.
Mais pourvu que les branchés ne transforment pas les vieux derbs de la médina en de nouveaux quartiers branchés en accélérant le départ en banlieue et autour de Oued Tensift des artisans qui ne peuvent plus garer leurs charrettes - avec leurs bourriques - sur des pavés nickel-chrom et aseptisés au Javel de Dordogne...
Avec la « branchitude » des quartiers populaires, les prix montent, l'immobilier fait son beurre et son gorgonzola, les terrasses des maisons de la médina deviennent des loft...
Virés de la médina, les autochtones vont maintenant s'installer à la sortie de la ville.
Ces autochtones auxquels les étrangers qui s'installent à Marrakech trouvent tellement de charme qu'on se demande ce qu'ils attendent pour aller les rejoindre.
A dos d'âne ou en petit taxi ?