Inauguré il y a tout juste 100 ans, le Théâtre Cevantes, plus communément appelé el Gran Teatro Cervantes, marque le souvenir d’une époque glorieuse pour la culture tangéroise. Si aujourd’hui le bâtiment paraît laissé à l’abandon, l'espoir de le voir rouvrir est toujours permis.
À l’initiative de ce projet dont la construction fut entreprise de 1911 à 1913 : un couple de riches bourgeois espagnols désireux d'accroître l’influence de la culture ibérique au-delà du détroit de Gibraltar. Il sera bâti grâce aux fonds personnels de Manuel Peña et de son épouse doña Esperanza Orellana, et c’est à l’architecte Diego Jiménez Armstrong que fut confiée l’intégralité du monument. Dans ses plans, cet ingénieux bâtisseur a tout mis en œuvre pour que le théâtre fasse abstraction du temps qui passe. Étant l’un des premiers édifices en béton armé de l’époque, les matériaux nécessaires à sa construction ont dû être importés d’Espagne. Dès son inauguration en 1913, de nombreux acteurs, chanteurs et musiciens du monde entier se sont produits sur cette scène, face à une assemblée pouvant aller jusqu’à 1 400 personnes. Voyant l'intérêt des spectateurs décliner au profit de l’industrie cinématographique, la salle s’est convertie en lieu de projection durant les années 1960.
En 1928, le couple à l’origine du projet cède le théâtre à l’État espagnol. Si durant les années d’après-guerre la salle ne désemplit pas, aujourd’hui seuls quelques rongeurs y ont accès. Propriété étatique, le bâtiment est resté à l’abandon durant plusieurs décennies, le laissant à la merci des outrages du temps. En 2006, un accord entre les ministères de la Culture du Maroc et de l’Espagne a sauvé le monument de l’effondrement. Bien que la façade et les boiseries paraissent en bon état, un million de dirhams ont dû être alloués aux travaux de consolidation de la structure qui menaçait de s’écrouler.
En 2011, un groupe d’Espagnols et de Tangérois fondent l’association « Soutenir ce qui tombe ». Cette organisation vise à préserver le Théâtre Cervantes en lui offrant une reconversion avec un complexe culturel dédié aux arts scéniques et musicaux. Rassemblant plus de deux cents membres, l’association présentera prochainement aux administrations de tutelle un dossier complet dont la finalité n’est autre que la cession du lieu. Une étude réalisée récemment a déterminé que 22 millions de dirhams seront nécessaires à sa restauration, fonds que l’association devrait trouver auprès d’organisations internationales et de donateurs locaux. Véritable patrimoine historique, el Gran Teatro Cervantes deviendrait ainsi un lieu d'intérêt touristique, à mi-chemin entre le musée et le centre culturel, tout en restant libre d'accès à la majorité de la population locale, pas forcément habituée au monde du spectacle.
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